Posée à cheval entre l’océan Atlantique et la mer des Caraïbes, la Guadeloupe a l’habitude des phénomènes et catastrophes climatiques, géologiques et aussi infectieux (épidémie HIV, résistance bactériennes, etc…).
Dès la sortie du Sars-Cov-2 hors des frontières de la Chine, le CPias Iles-de-Guadeloupe (IdG), comme beaucoup d’autres, s’est intéressé à ce risque pour être en mesure d’expliquer la nature de l’agent causal, le mode de transmission et les mesures barrières. Nous nous sommes donc préparés, sans trop y croire, à l’arrivée de ce virus émergent, fort de l’expérience précédemment vécue avec l’émergence du virus Ebola qui ne nous avait pas atteints.
Dans ce petit pays où il y a autant de « kimboiseurs » (voyants) que de « twachimen » (carrefours), personne n’avait pu prédire la catastrophe. Elle est arrivée en deux vagues.
La première nous est venue de l’Est avec principalement le tourisme européen via les bateaux de croisière (nos premiers clusters). Cette vague a atteint la Guadeloupe après l’hexagone, la trouvant ainsi déjà confinée. Le confinement général décrété par le gouvernement s’appliquait aussi chez nous. L’impact de cette première vague a ainsi été atténué, générant tout de même beaucoup d’inquiétude et d’interrogation devant ce phénomène pandémique.
De février à mai, l’activité principale du CPias IdG a été d’aider, de rassurer et d’informer les professionnels en expliquant la situation, le risque et les gestes barrières. Notre activité a aussi consisté à accompagner les équipes sur le terrain pour confirmer le rôle protecteur du masque, surtout pour le masque chirurgical. La Guadeloupe n’a pas été épargnée quant au scepticisme autour du type de masque à porter (chirurgical versus FFP2).
L’application des gestes barrières, des limitations des visites et du confinement général, a permis de passer la vague en Guadeloupe avec un pic maximal de 30 cas nouvellement hospitalisés par semaine et un maximum de 10 nouveaux admis en réanimation par semaine. Peu de cas nosocomiaux dans les établissements de santé (ES) et aucun établissement médicosocial (EMS) touché. Il n’y a pas eu de clusters dans ces établissements. Le CPias IdG n’a eu à expertiser et conseiller que pour 2 épisodes suspects (finalement négatifs) en établissement médicosociaux.
Le 11 mai 2020, comme toute la France, nous sommes sortis du confinement, déconfinés et donc confiants. Les vacances approchant, nous allions pouvoir tourner la page et retourner à la plage. Comme les fourmis ailées après un grain (après la pluie), dès la sortie du confinement, les rassemblements festifs ont repris de plus belle, favorisés par la période des grandes vacances. Avec cette liberté retrouvée, les corps se sont rapprochés : c’était la fête ! ; Mais le virus continuait à diffuser à bas bruit.
La deuxième vague nous est arrivée cette fois par l’ouest avec le tourisme nord-américain via l’ile de Saint-Martin. Nous nous rappelons bien de cette première alerte, car comme d’habitude, c’est toujours un vendredi après 17h. Nous avons eu un signalement de plusieurs soignants positifs à la covid-19, contaminés après avoir fait la fête dans la partie néerlandaise de l’ile : Sint Maarten. C’était le début de la seconde vague, mais nous n’en savions encore rien.
Cette seconde vague a été beaucoup plus forte que la première car elle nous a pris, insouciants et déconfinés. De nombreux professionnels ont été touchés, contaminés dans leur vie privée mais aussi au cours de leurs activités professionnelles. De nombreux clusters ont été identifiés en ES et EMS. Dans cette deuxième vague, le CPias a eu une très grosse activité de conseils et d’expertise pour aider à juguler l’épidémie dans ces structures de soins. De mi-août à fin novembre 2020, nous avons eu un pic maximal de 135 cas nouvellement hospitalisés par semaine et un maximum de 25 nouveaux admis en réanimation par semaine. Le CPias IdG a eu à expertiser et conseiller pour 151 épisodes dans les ES et EMS dont 16 clusters (au moins 3 cas dans une même unité de lieu et de temps et liés par une chaine de transmission).
Pour résumer : l’épidémie 2020 de covid-19 en Guadeloupe a eu deux vagues, deux origines différentes, deux contextes différents, pour le même territoire. Cette épidémie a eu un impact important sur l’activité du CPias IdG, mais pour des raisons différentes lors de chacune des vagues. L’activité du CPias IdG a été principalement de faire de l’information lors de la première vague, de l’expertise et du conseil lors de la seconde). Nous observons aussi que la capacité du CPias à expliquer le phénomène et à conseiller sur les mesures adéquates à prendre a considérablement augmenté sa notoriété et sa visibilité sur le territoire, dans et hors milieux de santé.