La promulgation le 1er novembre 2018 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, n’avait guère attiré l’attention de notre discipline. Cela n’avait de prime abord rien d’anormal car cette loi, dite EGALIM en langage courant, ne semblait en rien viser notre activité.
Toutefois l’article 76 a attiré l’avis de certains experts, en particulier de la SF2H, avec une formulation très ouverte qui dit d’une part que « Certaines catégories de produits biocides telles que définies par le règlement (UE) n° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 précité ne peuvent être cédées directement en libre-service à des utilisateurs non professionnels. » et d’autre part que « Toute publicité commerciale est interdite pour certaines catégories de produits biocides définies par le règlement (UE) n° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 précité ». Le tout assorti de l’annonce d’un décret en Conseil d’état fixant les catégories de produits concernés.
Cette loi voyait donc le spectre d’une nouvelle stigmatisation de nos biocides, en particulier des SHA, via une interdiction de la vente publique ou encore une impossibilité pour les établissements de santé de bénéficier de prix négociés à l’achat. Les perspectives potentielles étaient tout de même de voir les prix des détergent-désinfectants s’envoler au risque de ne plus être accessibles et pour l’hygiène des mains de recevoir le descabello après quatre années de bad buzz sur le sujet.
La préoccupation a été portée devant l’ANSES puis le Comité de suivi du PROPIAS. Le Ministère de la santé des solidarités s’est engagé à défendre les spécificités de la prévention du risque infectieux dans ce projet de loi nécessaire mais risquant de déborder de sa finalité initiale. Sans méconnaitre les enjeux du développement durable nos spécificités ont donc été plaidées auprès du Ministère de la transition écologique et solidaire en particulier par notre collègue Sylvie Renard-Dubois qu’il convient de remercier pour son excellent travail.
Après une phase très active de concertation, les deux décrets d’application sont donc parus à savoir :
Décret n°2019-642 du 26 juin 2019 relatif aux pratiques commerciales prohibées pour certaines catégories de produits biocides
Décret n° 2019-643 du 26 juin 2019 relatif à la publicité commerciale pour certaines catégories de produits biocides
Les produits biocides du type 1, destinés à l’hygiène humaine, ne sont donc pas concernés par cette nouvelle réglementation et c’est une très bonne chose. Pour les détergents désinfectants de surface, biocides de type 2 qui dans leur forme concentrée peuvent présenter les critères d’écotoxicité prévus par le décret, seule une interdiction de publicité vers le grand public s’applique.
En milieu de soins, il est évident que la nécessité de contribuer au développement durable ne peut être méconnue et est désormais très largement prise en compte par les utilisateurs comme par les industriels. Toutefois le risque infectieux, avec ses émergences comme le récent Candida auris, nous impose aussi un devoir d’efficacité biocide démontrée dans certaines situations. Concilier les deux n’est pas toujours aisé mais cette fois le législateur y est parvenu et c’est une excellente chose.