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Réussir le déconfinement : acte 1, le milieu scolaire

A l'aube du déconfinement, zoom sur les premières préconisations émises concernant le retour à l'école des enfants et du personnel scolaire.

Si la perspective de réouverture progressive des écoles le 11 mai fait l’objet de débats, comme toujours passionnés dans cet épisode, cela nous donne l’occasion de voir quelles préconisations ont déjà été faites à ce propos dans le monde et d’en retenir les points saillants.

Très tôt, les CDC américains ont proposé une stratégie en milieu scolaire pour lutter  contre l’épidémie. Elle comporte en particulier deux checklist dont l’une à l’intention des enseignants et l’autre des parents. Le contenu est assez similaire et repose sur les principes d’écarter les enfants malades du milieu scolaire, de suivre l’absentéisme et de renforcer l’hygiène des locaux. La checklist des parents leur confie la mission d’enseigner les gestes barrières à leurs enfants. Elle insiste sur la distanciation sociale avec un camarade malade, dont le corolaire pas toujours simple à appréhender doit être l’absence de stigmatisation, et aussi l’hygiène des mains dont l’usage de solutions hydro-alcooliques.

Pour ces produits  leur fiche de données de sécurité européenne comporte toujours le conseil de prudence P102 à savoir « Tenir hors de portée des enfants ». En effet, si l’enfant n’est pas en âge d’appréhender les choses il y a un risque d’ingestion ou de projection oculaire qui, même si ces accidents sont le plus souvent sans conséquence clinique significative, doit être évité. L’application d’alcool sur une peau est contre-indiquée en dessous de l’âge de 1 mois et les produits désinfectant à visée cutanée en contenant présentent souvent des précautions d’emploi jusqu’à 30 mois en général associés aux autres composants du produit. En pratique, un usage avant l’âge de trois ans n’est pas adapté. En milieu scolaire leur usage est identifié à partir de l’âge de 4 ans dans différentes études, par exemple pour réduire les gastroentérites, mais toujours sous la supervision de l’enseignant. La revue Cochrane parue ce mois-ci sur le sujet ne retrouve pas d’irritation cutanée différente selon la méthode d’hygiène des mains utilisée.

Les recommandations les plus structurées sont celles de lOMS de mars 2020, qui attirent l’attention sur l’hygiène des mains mais avec un versant pédagogique insistant sur l’organisation de temps dédiés réguliers au lavage des mains. Pour l’hygiène des locaux l’OMS insiste sur les priorités que sont les sanitaires et les surfaces fréquemment touchées comme les mains courantes, les poignées de portes, les tables de déjeuner et tout objet pédagogique ou ludique à caractère partagé. Un point important aussi reste de renforcer la ventilation des lieux au maximum ce qui en fin de printemps devrait être facilité par la douceur espérée.

Il est nécessaire aussi d’afficher et de diffuser les bonnes pratiques d’hygiène respiratoire en se servant des ressources existantes et à venir. On peut souligner l’excellent travail de l’éditeur Milan Presse qui a une page très bien faite pour les enfants et la mission MATIS a été très heureuse de collaborer à l’élaboration de plusieurs infographies dont celle sur les gestes barrières. On ne peut qu’inciter les enseignants de primaire à découvrir ces documents. C’est probablement le moment aussi de se plonger dans les nombreuses ressources que proposent la plateforme –e-bug.

En termes de pédagogie les recommandations  OMS proposent des approches par tranche d’âge allant, pour la maternelle, de la chanson permettant de se laver les mains assez longtemps jusqu’au lycée avec la prise de conscience du rôle de l’adolescent dans sa protection et celle des autres.

Arriver à assurer la distanciation sociale est évidemment le challenge le plus complexe. L’OMS rappelle que cela peut se faire dans le temps et dans l’espace. Limiter le nombre de personnes dans un même espace apparaît comme indispensable de même que ne pas organiser d’activité nécessitant des contacts étroits comme certaines pratiques sportives. Les anglais proposent en complément de limiter si possible l’usage des transports en commun des scolaires, d’étaler les horaires de repas et de récréation ou encore, pour les parents, de ne pas se regrouper à la sortie des écoles. Ils recommandent aussi d’avoir des effectifs d’élèves le plus réduit possible tout en les adaptant aux nombre d’encadrants disponibles. Conserver une part d’enseignement à distance reste une préconisation fréquente qui permet aussi d’alterner les temps de présence et donc la densité d’élèves. Le concept d’école à jour alterné verra-t-il le jour ? En tout cas pour les parents rien ne sera probablement complètement facile ni comme avant, au moins dans un premier temps.

Le concept de masque barrière vient de voir le jour en France et commence à être expérimenté timidement dans la population générale. Ses indications futures, et surtout celles à caractère obligatoire, ne sont toujours pas totalement définies. Si l’occasion se présente d’acculturer la jeune génération à son usage pour mieux préparer demain, le port continu chez des enfants très jeunes parait assez peu réaliste voire peu souhaitable au regard du mésusage attendu. Mais la question se posera pour les adultes et les plus grands des élèves. Au niveau international on voit que les positions sur le sujet varient comme l’illustre cette vidéo pédagogique du Ministère de l’éducation Québécois.

Evidemment, de nombreux travaux sont en cours pour préciser le contour de cette réouverture et en encadrer la pratique. Il s’agit là d’un des challenges qui s’offre à notre société à compter du 11 mai et ce n’est pas forcément le plus simple à relever pour les enseignants et l’ensemble des professionnels de ce secteur. Mais nous n’aurons pas d’autre choix que de l’affronter à un moment et il s’agit de le faire dans les conditions présentant le meilleur niveau de sécurité possible.

Les spécialistes de la prévention et du contrôle de l’infection seront là aussi pour accompagner cette démarche d’expertise et de changement de paradigme de notre société dans la mesure de nos possibilités.

Pierre Parneix

Responsable du CPIAS NA

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